“Vous travaillez dans la mode, monsieur” ? me demande-t-elle avec sa pointe d’accent japonais, en ramassant mon plateau de petit-déjeuner, immuable petit-déjeuner, le même à chaque trajet Paris-Osaka. Elle trouve mon écharpe parfaitement assortie à mon pull ; il faut dire que j’ai remis cette paire de lunettes du même coloris. J’ai fini mon thé, zappe d’un disque à l’autre sur la sélection d’Air France, cherchant à combler quelques lacunes et j’en suis à Camelia Jordana, plus tard ce sera des noms déjà oubliés puis le plancher des vaches. Sommeil. Nemui desu. Peu dormi. Les pas d’un enfant et son rire ont terminé ma courte nuit; maman a pourtant dit “chut !”. Ensuite les idées ont défilé, tout et n’importe quoi, peu importe, du moment que ça vous empêche de dormir.
Arrivé à l’aéroport, une équipe de télévision, qui m’avait déjà interviewé en mai 2014 je crois – j’avais alors pataugé dans un anglais mal réveillé – me pose la question qui fait le titre de leur émission : “Why did you come to Japan ?“, et comme je suis en mode auto-promo, on en vient à regarder mes photographies sur le petit écran du petit présentateur. Les voici alors avec l’idée de me suivre, donc de venir à Kyoto, pourquoi pas, ils m’appelleront, et en attendant me voici refaisant une prise, les laissant me suivre en sortant de l’aéroport, et les saluant en partant dans ce taxi collectif à 3300 yens dans lequel, malgré le sommeil, je ne m’endormirai pas.
Plus tard non plus, une fois la maison retrouvée, attendant de m’effondrer vers 19h. Je pars donc dans l’après-midi retrouver les bords de la rivière et les couleurs de l’automne, encore présentes, disséminées, diluées dans les branches vides.