Vendredi 10 novembre 2017

Yuna nous présente. Je ne comprends pas son nom. Ne fais pas répéter. Très vite elle en dit plus sur moi, alors il me demande ce que je fais comme genre de photos : De l’architecture ? Non, pas ça, je réponds, pas ça, alors pour monter des exemples je sors les petits livres que j’ai apportés. Dont le petit carré. Ah oui, parfois, de l’architecture. Ils sourient. Autour de nous, des photos et encore des photos. Là-bas, Saé, joie. J’ai passé un moment à regarder, à chercher ma place, le signe qu’il y a dans cet univers un recoin pour moi, mais il n’est pas ici, pas dans une foire. J’ai passé un moment à parler, en anglais entrecoupé de japonais voyez-vous, peu importe ce qu’il disait, peu importe que j’aimasse ses photographies, c’est ça, là, ce pays, et puis un peu plus loin les images d’un Coréen, tant aimées à Kyotographie, et juste à côté des garçons, nus, bientôt militaires et ici pudiques, travail beau, vraiment beau, lumineux, les regards, les mains qui cachent, les cuisses qu’on croise, loin du stéréotype du nu féminin occidental qui sera évoqué le lendemain, justement. Bref, on part, je dis “on” car Niu est là, c’est bien qu’il soit là, il m’emmène là où je ne vais jamais, Palais Royal, cette boutique ultra-chic de vêtements taïwanais tenue par une anglophone qui se plaint pourtant du prix du voyage au Japon et puis ce magasin de bougies, bref. Une autre émotion, ces portraits de migrants souriants, dont la vie rebondit joliment, ils sourient à l’espoir et au renouveau, et puis nous y voilà, deuxième foire, des livres cette fois, ça grouille aux Beaux-Arts, ça grouille et le hasard est là, dans cette publication qu’une Japonaise est en train de signer. Je feuillette et me souviens, ni du lieu ni du moment, mais j’ai déjà vu ces images, je les avais adorées, c’était les meilleures d’une expo, oh bien sûr j’imagine qu’elle ne me croit pas quand je lui dis, oui c’est ça c’était au musée de la photographie de Tokyo, mon journal de janvier avait été muet, il n’y avait que des images, tout l’opposé d’aujourd’hui. Et puis je m’éloigne, elle doit se demander pourquoi je ne mets pas 15 euros dans sa publication que j’aime tant. Et là encore je cherche mais je crois qu’encore, ma place n’est pas là, pas dans cette foire.

Et puis voilà. Des visages d’avant. Les gens qu’on embrasse. Ceux qui ne savent pas. Ceux qui, déjà, étaient là mercredi et qui en rient, de se voir là, encore. Et puis le Japon, encore, encore, toujours, tellement de fois aujourd’hui, encore donc maintenant pour le film de Judith et Masa. Soudain, sur l’écran, un policier. En une fraction de secondes, c’est tout ce que j’aime dans ce pays et l’on rit. L’envie revient. Je m’imagine.