Dimanche 13 juin 2021

Il y a cette image de deux amoureux qui se tiennent par la main. Je n’aime pas trop cette photographie, son cadrage, leurs vêtements, les couleurs, l’évidence de ce qu’elle montre, alors ici je la cache.  On y aperçoit le tatouage de ma nièce à l’arrière de son bras gauche ; ses ongles sont noirs. Nous sommes allés marcher malgré la chaleur qui accable les passants. Un peu plus tôt, elle avait raconté ce jour où il l’avait regardée jouer du piano. Il était derrière elle, évidemment muet, probablement subjugué. Elle, elle n’y croyait pas que R, le plus beau du collège à l’époque où ils le fréquentaient tous les deux, était là, à l’écouter. Il y avait donc chez eux cet absolu un peu fou d’un amour qui passe par les yeux et que je comprenais tant.
Un peu plus tard, à une terrasse, elle avait demandé à ses parents s’ils ne regrettaient pas d’être restés là, ainsi, là, dans ce qui ressemble à une immobilité quand on ignore les mouvements qui passent à l’intérieur, où qui se dessinent plus finement dans une carrière professionnelle. A sa façon de leur parler ainsi, j’avais entendu une adulte, les pieds dans les incertitudes de la vie, comme j’avais entendu sa sœur parler de ses collègues, donc s’exprimer autrement que par leur rire quand elles répondent à mes traits d’humour, comme d’éternelles enfants.
Ce moment en famille, dans ma propre incertitude professionnelle qui me traverse depuis une dizaine de jours suite à une proposition alléchante mais un peu folle, c’est autre chose qu’un regard sur des enfants qui n’en sont plus. C’est la certitude que je ne veux pas m’éloigner de cela, de ce ciment familial fait de leurs sourires et de ma relation avec ma sœur, pas aujourd’hui ni même peut-être demain. Pas m’éloigner non plus de ces allers-retours chez mes parents, simples, devenus rares le temps d’un virus, mais légers, simples et évidents. Pas m’éloigner de moi-même ?