Lundi 13 septembre 2021

Alors l’homme rentre chez lui, il est tard. Soudain, le scénario dévoile ce que tu as plus ou moins vécu. Sur le fauteuil rouge du cinéma, à côté de toi, je suis comme pétrifié.

Je n’utilise pas cet adjectif quand j’évoque ce passage, une fois dehors, installés à une terrasse où il fait encore chaud. Nous parlons du film, intense, complexe, trois heures qui donnent du temps au cinéma dans un montage élancé, plein de longues respirations, de dialogues qui disent tout ce qu’il y a à dire, de silences frappés par les gestes de la langue des signes coréenne. Il y a des scènes magnifiques dans ce Drive My Car, des personnages forts, mais je crains de l’oublier, oui j’ai cette sensation, provenant notamment du fait qu’aujourd’hui, je crains de tout oublier.

Et puis il y a le Japon, sa langue, ses routes, ses parkings, ses petites phrases intraduisibles.

Surtout, le cinéma devient, comme les livres, une pause. Mon rapport aux images en mouvement et aux récits est en mutation. J’y trouve une présence, et c’est aussi la mienne, comme en une forme de méditation. Ainsi, durant les trois heures que dure le film, je n’ai pas regardé l’heure. Je crois que c’est la première fois que cela m’arrive. Je n’étais ni curieux ni impatient. J’étais là, dans un temps suspendu où rien d’autre n’existe, si ce n’est quelques souvenirs sortant des images.

J’y trouve une présence, la mienne.

Nous ne parlons pas que du film. Nous parlons aussi de toi, de moi. De ce qui fait absence, un peu.