C’est finalement comme si on se connaissait depuis longtemps : ça prend, tout de suite, la conversation, comme une mayonnaise. Comme celle avant son spectacle ?
J’ose. J’ose un trait d’humour qui pourrait sembler un crise de lèse-majesté alors que j’ai aimé ce moment, ces heures qui passent devant un thé vert puis un autre et son spectacle, mercredi, puissant. Quelle performance !, lui avais-je écrit.
Devant le deuxième thé, chez moi, je lui tend le catalogue “L’image d’après”, catalogue d’une exposition que je n’ai jamais vue, livre qui m’a aidé à me questionner autrefois. C’était lorsque je travaillais sur la série”Vous Suivre”, je crois, car il y avait gravée en moi une image du film Pas de printemps pour Marnie, d’Alfred Hitchock : Tippie Hedren marche de dos sur un quai de gare.
J’ai sorti le livre car je savais que ce livre touchait cela du doigt une part de ma photographie évoquée par Nicolas devant le premier thé : celle qui ne fait pas que saisir un moment, mais celle qui laisse la suite en suspens, notamment lorsque les corps se déshabillent. J’étais très heureux qu’il voit cela dans mes photos, Nicolas. J’étais très heureux, je lui suis donc là, de parler avec lui, de me sentir artiste – notion très fragile pour moi -, face à un autre artiste, et de l’entendre parler de lui. Il y avait une convergence, rare. C’est quelque chose qui me manque, ici, de parler avec quelqu’un qui crée. On parle de la nécessité de créer, aussi, enfin lui surtout en parle, j’acquiesce. Il sait dire ; il a su se nourrir de références que je n’ai pas, d’une assurance que je n’ai pas non plus.