C’est le matin. Je suis à la maison. Depuis hier, il reste sur la table basse les deux tasses vides et le catalogue “L’image d’après”. Je l’entrouvre, je découvre qu’il y a là un papier A4 plié en deux. Dessus, de ma main, il est écrit au crayon de papier :
Il n’y a peut-être pas d’art véritable – y compris photographique – sans cette dimension d’absence, cette présence au cœur de l’acte photographique d’une image d’avant la rencontre avec la réalité présente.
Nous y sommes. Disons que nous sommes quelque part où j’essaie d’être ; j’y faisais allusion hier.
Il y a quelques jours, en écrivant un texte sur mon travail, texte qui sera en ligne dans une semaine, j’essayais d’exprimer la présence de l’absence dans ma photographie : dans les rues d’Arica, sur les aires de jeux pour enfants, ou sur les tombes où les vivants sont plus absents que les morts. La version finale du texte n’énumère plus rien, je n’y arrivais pas, et puis c’était trop long : il n’y a pas une forme d’absence. C’est d’ailleurs encore autre chose ici, une autre absence, un autre raison à l’absence.
Et puis, le soir, atelier de lecture à voix haute, évoquant un passage de la page 157 du livre d’Antoine Wauters, je dis : “Quand j’écris, parfois, je comprends ce que je n’écris pas.” Lapsus. Autour de moi on s’en empare, Isabelle adore, plus tard elle y reviendra, Michel s’exclame. Plus tard, Sophie dira que je dois essayer d’être moins chichiteux lorsque j’étire les mots. Elle dira aussi que j’ai un côté durassien dans les fins de phrase. Maud me regarde, complice, je ris.