Dimanche 14 juillet 2024

Mon arrière grand-père, Lucien Boucaud, était un sacré bonhomme. Militaire, il avait fait les campagnes d’Afrique à la fin du 19ème siècle. Nous avons donc de lui quelques images presque effacées venant de tout là-bas, quelques armes, quelques défenses de phacochère, des questions aussi. Spoliation ? Achat ? Après la mort de sa première femme Aurélie Gatineau en 1915, il avait épousé sa cousine germaine, de 26 ans sa cadette, Louise Courtois. Les parents de ma grand-mère paternelle, ma mémé Lucette, étaient donc cousins germains, et avaient, je le répète, 26 ans d’écart. C’est au matin que je découvre ce détail qui n’en est pas un, ou sans doute le redécouvre car j’imagine qu’au hasard des conversations avec mon père, au hasard de ses envolées quasi lyriques quand il parlait de généalogie et notamment de ce grand-père intrépide qui pose au milieu de ses collègues sur la cheminée de mon salon dans une photo que j’aime beaucoup — il est alors cantinier à Paris, c’est peut-être la guerre ou juste avant —, j’imagine que mon père a évoqué cela. Nous sommes plongés dans quelques photos avec ma mère, je ne sais plus pourquoi, pourquoi lui, eux, je ne sais plus ce qu’alors on cherche quand j’écris ces lignes. Lucien, me raconte alors ma mère, avait promis à Louise de l’épouser un jour quand elle serait assez âgée. Alors je souris. Non pas de cette promesse, mais de ces 26 ans, qui donc séparent, ou unissent. Car — ou Et ? — l’après-midi, lorsque maman me pose quelques questions sur mes vacances, te voilà. Je te raconte un peu. Je me dévoile un peu. “Comme Lucien Boucaud“, alors j’ajoute.