La maison rouge. Dès l’entrée de l’exposition, une émotion, offerte par les images, émotion qui s’éteint un peu, je l’avoue, au bout de plusieurs salles, quand le noir et blanc ne donne plus à voir que l’obsession du noir et blanc. Mais, malgré ce bémol purement subjectif, la collection de Marin Karmitz est superbe. Elle confirme ce que j’ai toujours aimé dans les expositions de collections : d’une part ce regard presque intime sur le monde que nous offre celui qui possède ces images (ou ces objets) et d’autre part les images et la puissance de photographies inconnues ou rarement montrées.
Niu s’étonne, s’interroge. Et m’interroge. Sa connaissance de l’histoire européenne, des années 30, de la deuxième guerre mondiale, et de — oh qu’il est terrible d’écrire ces mots — l’extermination des Juifs est plutôt en surface. En surface car non absorbée, comme pour nous Européens, via une accumulation d’images et de mots, dans les livres d’histoire, la visite du musée de la déportation à Brive-la-Gaillarde à 13 ans, les documentaires, les récits, les discussions, Marguerite Duras qui répète qu’elle y pensera jusqu’au dernier moment, les travaux d’artistes, la tentative d’imaginer l’inimaginable, puis plus récemment les génocides au Congo ou les charniers en ex-Yougoslavie et donc la peur / la preuve que cela recommence. Son histoire, en tant que Taïwanais est, je suppose — il faudra que je lui demande —, plutôt porté par une Chine oppressante et un Japon envahisseur, militaire et sanguinaire, d’autres abominations donc, qu’ici on a à peine absorbées.