La langue anglaise m’est habituelle, quotidienne dans mon travail, mais pas familière. Alors souvent je te fais répéter. Si nous nous écrivons, parfois je vérifie, je copie-colle, et Deepl ou Google me rassure, m’aiguille, me corrige. Je suis ainsi un autre moi-même. L’ai-je déjà écrit ici ? A force de l’avoir exprimé, à E ou J, ou à moi-même, je ne sais plus. Lorsqu’intervient cette langue dont tu maîtrises à merveilles toutes les fluctuations de la prosodie et du vocabulaire, toutes les finesses et les voluptés, je me retrouve être une personne moins légère, moins pétillante, moins bavarde, moins drôle ; parfois je dis que je ne m’aime pas dans cette langue. Pourtant, on m’a peut-être aimé via elle, pour ce que je disais avec elle. Pourtant j’aime la prononcer, fouiller dans les intonations, imiter les sons. Mais mon humour reste parfois collé au fond de mes poches. Ma sensibilité se frotte à l’efficacité d’une conversation qui doit étouffer le silence. Mon envie de te raconter ma journée bute contre les mots. Comment dit-on buter ?