Jeudi 13 avril 2023

Prendre le temps d’être ici, maudire un peu la pluie mais elle se fait discrète. Une boutique puis une autre, une expo puis une autre, la beauté d’un gisant en tricoté-tissé par Jeanne Vicerial, l’indispensable regard de Zanele Muholi, et puis un de ces troquets où ça commente les manifs au comptoir. Au loin ça fume un peu. Paris semble vivre au rythme de cela, les poubelles renversées, les fumées, les CRS qui courent, les rues bloquées, et moi je reste au loin.

Curieux d’autres combats, d’autres approches, me voilà plutôt, plus tard, à discuter autour d’une revue, PD la revue elle s’appelle ; tabourets noirs, masques blancs parce que ça se fait encore. Je ne sais pas trop pourquoi je suis là, par curiosité, par “allez, on ne sait jamais”… Je suis, je crois, le plus âgé du groupe, et lorsque la question est posée “Vous vous rappelez la première fois que vous avez entendu parler du Sida ?“, j’évoque un souvenir d’enfance, je pense que c’est en quatrième, je dois faire un exposé (oral il me semble) sur le Sida. Nous sommes donc, je suppose, l’année scolaire 1987-1988. Les décès en France commencent à se compter par centaines et Barbara chante Sid’amour à mort. Je revois les dessins dans le livre de biologie : ça ne s’attrape ni par les moustiques, ni par les toilettes, mais par amour. Je ne me souviens de rien d’autre, surtout pas de mon “regard” sur cette question, de mon appréhension ou de tout autre sentiment ou émotion. Une chose est sûr, je reste au loin.