J’associe, à tort ou à raison, mon mariage avec la mort de mon père, dans le temps. Qu’il existe d’autres liens, sur d’autres plans, entre ces deux affaires, c’est possible. Il m’est déjà difficile de dire ce que crois savoir.
::: Samuel Beckett ; Premier amour
Matin. On sort un pantalon d’une housse en plastique ; c’est la saison où l’odeur de naphtaline dérange un peu avant de se dissiper. De l’autre côté de la fenêtre, une forte lumière frappe la fascia trop blanche au-dessus de la coursive, il faut un peu fermer les yeux ou détourner le regard, il faudrait tirer les rideaux mais le ciel est si bleu. Il y a soudain une chanson qui passe, qui dit beaucoup de choses, ça bouscule. Et puis on clique ailleurs, Arica est à la une, la peur, l’exil, le désert pour des Vénézuéliens loin de chez eux, et c’est un peu ce pourquoi je suis allé là-bas, pour voir et imaginer l’exil, repartant après avoir m’être heurté à ce qui n’a pas eu lieu, imbousculé.
Soir, changement, ton sourire est déçu, l’impossible se dresse entre la mer bleue et toi. Il n’y aura pas les gens dans leur folie à eux d’être là, il n’y aura pas les draps blancs d’une chambre d’hôtel et la mer plus bleue que bleue puisque c’est comme cela que je l’imagine, la mer là-bas. Il n’y aura pas ton ami qui porte un prénom de cousin et de chanson. Il y aura, en revanche, nous plus tôt, et moi plus vite dans cet endroit tout aussi fou, le désert plutôt que la mer, le bleu dans tes yeux plutôt que dans l’horizon, les cactus et que sais-je encore.