Lundi 15 juin 2015

Alors la jeunesse arrive, tas de sacs à dos à gauche de la porte d’entrée, vêtements courts et légers car il fait chaud, aisance malgré une certaine solennité et les voici donc assis par terre. Mais c’est toujours la même question : il fait froid l’hiver ?

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Dimanche 14 juin 2015

Parfois, pour être un peu plus léger, je n’emporte pas mon appareil photo. Parfois, je le regrette. Sur la terrasse de la Villa, alors qu’on avait installé tréteaux, planches et nappes, certains que la pluie ne viendrait pas nous déranger, c’est le soleil qui est apparu. Là, malin, dans un intervalle nu entre les cimes et les nuages, intervalle orange, vibrant, qui mettrait au pilori le moindre snobisme et ferait renaître les émotions mortes depuis belle lurette devant les couchers de soleil. Chacun s’exclame, file chercher son appareil ou, comme moi, sa tablette, histoire d’avoir un souvenir, une note en image pour une éventuelle description approximative puisque la pauvre tablette ne sait pas quoi faire, éblouie. Toi tu profites de cette lumière dorée pour garder un souvenir de Dominique, chemise blanche, arrivée un peu plus tôt, souvenir radieux et souriant malgré le décalage horaire, puisque le plaisir d’être ici est toujours plus fort que tout.

Vendredi 12 juin 2015

Ce n’est que le lendemain qu’on réalisera qu’on avait oublié le fromage dans la quiche. Pas de quoi gâcher la soirée, mais pour notre réputation, c’était un peu sec…

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Jeudi 11 juin 2015

Alors, à la caisse de chez Fresco, l’employée me tend un dé en mousse de peut-être 30cm de côté. Je ne comprends rien à ce qu’elle dit trop vite, mais par ses mouvements de tête et de bras, je devine qu’elle me propose de jeter le dé derrière, dans cette caisse en plastique vert bouteille. Évidemment un court moment j’hésite en raison de cette situation que je trouve un peu idiote. Mais bon, me voici, imaginez donc la scène, jetant ce dé juste derrière elle, en pensant qu’il va peut-être rebondir en dehors ou quoi, mais non, je fais un cinq. Ravie, elle me tend une boîte d’œufs dans laquelle il y en a, bien sûr cinq. Je la remercie, parviens à ne pas éclater de rire et repars. Ce n’est qu’un peu plus tard, narrant cette aventure de manière concise sur un réseau social, que le rire vient, et me voici pleurant.

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Mardi 9 juin 2015

Ne pas se préoccuper du temps puisque la saison des pluies s’installe et qu’il va bien falloir s’habituer. Partir équipé comme une éventuelle pluie. Et aller plus loin.

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Lundi 8 juin 2015

Il y a, dans ces jours où tu pars si tôt pour prendre le premier train, celui de 6h18, l’avantage de se sentir obligé de se lever tôt pour aller capt(ur)er les rues vides de Kyoto au petit matin. Il est 5h08 quand la première image est prise, Kitayama dori est sans âme apparente, même si quelques taxis circulent, même si on livre déjà, même si d’autres lève-tôt errent aussi, dont un certain nombre n’est là que pour marcher sans autre but que faire de l’exercice. Il faut donc tricher, faire croire que… et attendre que les taxis et passants disparaissent. Mais la lumière de ce matin de juin est triste, le ciel est bas, on se demande si l’on est déjà à la saison des pluies et le résultat n’est pas à la hauteur de mes espérances. La nuit est décidément plus propice aux rues abandonnées. Pourtant, la nuit venue, nulle image, d’abord parce qu’il était sympathique de partager ces pâtes avec S, ensuite parce qu’il pleuvait. Mais depuis quand est-ce une bonne excuse ?

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Dimanche 7 juin 2015

Le film du soir : 世界の中心で、愛をさけぶ, ce qui veut dire “Au centre du monde, crier son amour”. Tout un programme, n’est-ce-pas ?

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Vendredi 5 juin 2015

Et c’est ainsi que, de fil en aiguille, j’en arrive à écouter 3 fois de suite cette chanson oubliée – même si l’on ne peut pas vraiment oublier Priscilla Folle du désert – parce que, ô surprise, elle est dans ton film que, ô surprise, J conseillait de regarder aux lecteurs de cet article dans lequel, ô surprise, il y avait mon nom accolé à une image.

(Et plus tard, que nous rimes !)

Jeudi 4 juin 2015

“On osait pas tout d’abord, rapporte-t-il, regarder longtemps les premières images que [mon père] réalisait. On reculait devant la précision des sujets représentés et l’on croyait que les minuscules figures sur les images pouvaient nous voir ; c’est de cette manière, sidérante, que l’inhabituelle netteté et l’insolite fidélité des premiers daguerréotypes agissaient sur nous”

Max Dauthendey ; Petite histoire de la photographie, Walter Benjamin

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Mercredi 3 juin 2015

Lorsque j’arrive il est déjà tard, j’ai manqué les présentations, les discours, tout le monde est là, souriant bien sûr, chacun a son exemplaire du livre et tu t’apprêtes à le prendre aussi. Es-tu là depuis longtemps ?

Quelques discussions autour de mes activités (réelles ou rêvées) et puis l’on part pour ce dîner tant attendu — depuis un an, on peut le dire. Souriantes bien sûr, voire pétillantes, elles nous offrent deux objets magnifiques qui trouveront facilement leur usage, leur place, et le moment opportun pour les montrer sur ce journal.

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Mardi 2 juin 2015

Il est des endroits du quartier que l’on retient par leurs détails, leur positionnement géographique. Pourtant j’avais oublié que l’on avait remonté ce chemin escarpé ensemble, mon souvenir était personnel, un de ces moments à vélo à chercher les images à faire. Le chemin en question borde la maison de Mishima san et depuis le temps qu’elle nous disait de venir prendre un café, enfin, nous y voilà : café. Au lait, certes.

Nous partons ensuite vers les hauteurs d’Ohara où l’on pique-nique en regardant plus bas, si loin. Et puis c’est Kurama, pour un bain évidemment, presque seuls, et quand soudain l’on n’est plus que deux, je m’offre un souvenir photographique interdit. C’est au sortir du village que cette faute sera punie par un petit garçon tendant deux doigts pour imiter un pistolet. Pan ! Et sourira, avec malice.

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Lundi 1er juin 2015

Tout n’est que mouvements lents, musique et chants, mais j’hésite sur le mot “chant”. Nous n’avons pas lu , avant de venir, ce qui allait se passer sur scène, alors nous ne pouvons qu’être dans une sorte de pure situation, celle du spectateur qui ne sait rien et ne comprend rien ; nous sommes regardeurs, écouteurs. On peut – notez comme soudain je passe à l’indéfini, emportant dans mes pensées les autres regardeurs – inspecter les vêtements sur scène, les décortiquer, même si l’on est loin, et s’en étonner. On peut regarder les gens autour, s’étonner là aussi, qu’il y ait des ados, baskets et sacs à dos, des filles aux cheveux bleus. On peut facilement être dérangé par les bruits de pas sur le gravier, derrière, puisque l’on est à trois rangées du fond, arrivés bien après les premiers rangs. On peut même facilement s’endormir, même sur ce banc de bois. On peut partir au bout d’une heure et trente minutes, comme un grand nombre d’occidentaux, eux aussi au fond, eux aussi curieux de cet art qui reste un grand mystère.
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Et aussi
Des plantes, I&A, Muji

Samedi 30 mai 2015

C’est à l’aurore, ou plutôt un peu après, car l’aurore est si tôt qu’elle est presque invisible, que l’on se lève et qu’alors, le guide touristique posé sur la table, tu m’annonces où nous partons. La surprise s’estompe, remplacée par la joie d’aller à Ise – pour s’étonner encore – et au bord de la mer, la mer, la mer, enfin la mer !

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Jeudi 28 mai 2015

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La photographie prise entre ces deux images montrerait 5 collégiens le nez dans leur téléphone portable, assis sur une banquette dans le métro. La similitude de leurs vêtements permettrait éventuellement un sourire et appuierait la question de l’uniforme et des libertés que l’on peut prendre avec l’uniforme. Tous porteraient un pantalon sombre, dont les motifs discrets ne se verraient pas au premier coup d’œil. Sur les 5 collégiens, on verrait 2 polos blancs et 3 chemises blanches avec cravate à rayures – la même cravate pour les trois. Les chaussures seraient de sport, et les sacs à dos de marques Adidas, Puma ou hummel ; on verrait également deux sacs de raquette de tennis.

On pourrait ensuite raconter la surprise délicieuse de voir Rika auprès de qui je m’étonnai de l’usage de désherbant , la difficulté (un peu bête) de trouver des enveloppes au format A4, l’exposition de Kohei Nawa (et de deux autres artistes) dans ce musée dont je ne sais finalement toujours pas le nom, et l’instant gourmand au R.C. accompagné en musique par un guitariste osant un peu hésitant un “Top of the World” des Carpenters, un “My Song” d’Elton John ou encore ce “Tears in Heaven” d’Eric Clapton dont la guimauve me semblait interdite en dehors des souvenirs du Top50 mais n’enlevant rien au plaisir d’être là.

 

Mardi 26 mai 2015

Apprendre une triste nouvelle lors d’un dîner qu’on ne pourra pas qualifier de frugal et y voir là une vache ironie.

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Lundi 25 mai 2015

C’est la fin du voyage. Les femmes sont devenues domestiques. Les hommes partagent les durs travaux des travailleurs émigrés en Europ : construction des routes, chantiers. Et comme ils ne sont pas “spécialisé”, que les salaires son bas et qu’un enfant naït tous les neuf mois, ils vivent à dix, à quinze, dans des baraquements insalubres, sans électricité ni installation sanitaire, parfois même sans eau potable. Certaines tentatives de “relogement ” se sont soldées par des plaintes : les gitans arrachaient les parquets et les plafonds pour se faire un feu de camp.

Hervé Guibert, à propos des photos de Josef Koudelka ; La photo, inéluctablement.

Il y a dans la boîte aux lettres, ce qu’on lit ci-dessus. Il y a les puces avec J et ce garçon allemand. Il y a cette plante aux fleurs recroquevillées, qui soudain s’ouvrant dans le panier du vélo, ont presque l’air banal. Il y a ce jardin d’enfants, lapin aux yeux rouges et cochon enseveli. Il y a ces pivoines et cette autre fleur, omoshiroi comme dit la vendeuse qui m’offre une autre pivoine comme il arrive parfois ici. Il y a donc un Allemand très bien habillé qui vient dîner puisque le matin sa jovialité nous a accompagnés aux puces.

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Dimanche 24 mai 2015

Alors, pour la première fois, on sort la table sur la terrasse. Nouveaux convives, nouvelles habitudes peut-être, avant de retrouver le belvédère de F, nouvelle habitude sûrement.

Vendredi 22 mai 2015

On pourrait parler du visiteur québécois, de la séance photo-clafoutis, du tee-shirt à fleurs, du vin espagnol. Mais il était question ce jour-là de parler d’ici : notre maison, l’habitat, là où l’on vit. Questionner son “chez-soi” est un exercice intéressant, et me voici donc à parler de ses particularités, de son intelligence, de ses merveilleux détails, de l’horizon qui ne se limite pas à un ciel aperçu derrière une fenêtre, de cet environnement sans lequel les baies vitrées n’auraient pas le même usage, du grand écart tout japonais entre cette architecture contemporaine et le quartier “campagnard”, de la limite, des limites entre l’intérieur et l’extérieur, entre l’espace privé et l’espace public, d’une certaine non-japonéité du lieu par ses transparences à l’opposé du verre cathédrale qu’on impose ailleurs, d’un évident rappel à l’architecture traditionnelle locale, de ma méconnaissance des usages architecturaux dans d’autres pays, de cette question des espaces partagés et du vivre ensemble qui revient toujours et que l’on connait à Ivry. Évidemment on en vient à parler de cette esprit de communauté, des dîners entre voisins, du partage et de la proximité, des relations qu’on peut de plus en plus qualifier d’amicales, mais il est déjà trop tard quand j’apporte les clafoutis, le journaliste est reparti.

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Mercredi 20 mai 2015

Alors voici Mishima san qui passe, accompagnée. Vieni, vieni!, dit-elle dans son enthousiasme habituel. Et nous voilà à discuter Charlie et voisinage avec une Norvégienne et sa fille. Va falloir songer à réviser mon italien, car j’en perds mon latin…

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Mardi 19 mai 2015

Soleil de fin d’après-midi, lumière chaude. Je suis en train de couper une branche pour rendre l’un des bouquets un peu moins raides, il fait un peu frais une fois arrivé dans les montagnes. Tu m’appelles, tu me proposes que l’on se retrouve, oui je vois où, au bord de la rivière.

Alors au bord de la rivière, avec de quoi se rafraîchir, il y a ce type avec sa raquette de tennis, descendu sur la berge pour quelques mouvements de bras. Regard étrange, appuyé, comme soupçonneux, aigri, comme s’il n’appréciait pas que tu te sois garé là, en face de chez lui, masquant une partie du paysage. Comme s’il voulait une bière ? Quelques mouvements de raquette, un court instant assis sur le banc d’à-côté et le voilà reparti… Inspection terminée ?

(+ le début d’un film sur 8 types perdus en Antarctique)

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Dimanche 17 mai 2015

Une heure de train, trois quarts d’heure de bus, et c’est l’île d’Awaji, le bord de mer, un air de vacances avec ces palmiers, ce bar, ce bâtiment rose là en face. Le café est léger, le chien rapidement silencieux, je pense à la Californie. Le trajet a été l’occasion de relire les pages du carnet rouge ; qu’en faire ?

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Samedi 16 mai 2015

Là-haut, là aussi, le paysage a changé : les fougères ont envahi la pente nue. On commence à ressentir l’été, la moiteur, et malgré cette brume éblouissante on regarde l’horizon et cherche encore nos toits.

Et le soir, le ciné-club entraîne des éclats de rire inattendus et rafraichissants pendant le Voyage à Tokyo d’Ozu. Un long voyage, non ?

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