Jeudi 5 mars 2015

Dans un instant, ce jeune homme d’allure orientale, Nasri Sayeg, va se mettre à lire, à notre intention, quelques pages du livre qu’il tient entre les mains, qui est Le Côté de Guermantes de Marcel Proust. Après qu’il m’a longtemps un peu ennuyé, ce volume est devenu l’un de mes préférés dans l’ensemble de l’œuvre. J’aime à changer, à vieillir avec sa lecture.

Véronique Aubouy, Mathieu Riboulet ; A la lecture

Le (seul ?) docteur généraliste francophone de Kyoto reçoit quelques demi-journées par semaine à la clinique H, derrière la porte verte du bureau n°5 du 2ème étage. Sur les affichettes qui couvrent les murs du couloir où je patiente, et plus largement, de toute la clinique, les personnages dessinés grimacent, toussent, sourient, et, même dans ce pays ou le masque est de rigueur au moins kaze, on rappelle au patient qu’on évitera de postillonner au visage de son voisin. On aperçoit aussi, là-bas, un estomac qui sourit, et j’hésite à décrire avec précision tout ce qui m’entoure (l’appareil électronique pour mesurer la taille des personnes âgées, par exemple) et ce qui m’arrive (l’incompréhensible message en japonais dans une des salles d’attente, par exemple), mais le livre que je tiens entre les mains est une rude concurrence pour mes envies d’écriture. Je découvre alors, histoire de vérifier que tout va bien, la mécanique bien huilé du système médical local, pour, au bout d’une heure, obtenir résultats et satisfaction – en dehors d’un indécrottable taux un peu trop élevé de cholestérol malgré une consommation de légumes rarement atteinte depuis mon installation sur le sol japonais.

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Le film du soir : Rykyu

Mercredi 4 mars 2015

Alors, en face, derrière la vitrine du magasin de pierres tombales, j’aperçois un Hello Kitty de granit.

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Mardi 3 mars 2015

Son collègue, chauve, placé à sa gauche et enfin disponible, vient à sa rescousse. Avec ses rudiments d’anglais, il espère que cela facilitera nos échanges, mais d’une part il trouve vraiment compliqué que deux hommes puissent être mariés et d’autre part son accent lui fait prononcer un « databeuze » que je ne comprends pas. Il répète, finit par écrire « Date of bir… » et je le coupe en riant et lui disant que ok ok j’ai compris. Il repart penaud, appelé par un autre administré, et sa collègue et moi terminons ces démarches avec toute la patience nécessaire et surtout, de sa part, avec un phrasé lent et articulé indispensable.

Passant du coq à l’âne et d’une carte à l’autre, nous voici, cette fois toi et moi, au comptoir du loueur de vidéos. Le remplissage du formulaire se fait plus simplement, même si je ne saurai jamais pourquoi elle m’a demandé qui était le plus jeune de nous deux d’une manière telle que j’ai cru que cela avait son importance dans l’inscription… alors que cela n’en avait évidemment pas et qu’elle devait demander cela par sympathie, genre pour détendre l’atmosphère qui n’était pas tendue sauf peut-être de leur côté du comptoir, désarçonnées de ne pas être comprises à cause de cette fichue manie de ne pas aller à l’essentiel.

Et nous voilà donc, le soir, pour notre première séance de découverte du cinéma contemporain japonais, regardant…  heu… ça :『小野寺の弟・小野寺の姉』

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Lundi 2 mars 2015

A l’entrée du parc, je tente de déchiffrer ce qui est écrit sur le panneau, en supposant que malgré son aspect vétuste il n’est pas obsolète, et ne tire comme information que le fait que le mardi est un jour spécial, et qu’il est ouvert entre 9h et 16h30. Mais cela ne m’aide pas à comprendre avec certitude l’usage de cet endroit, qui est probablement (chaque mardi ?) un lieu où les enfants apprennent les rudiments du code de la route. Cela ne m’explique pas non plus la présence d’une ancienne locomotive et de deux wagons qui me font penser aux Mystères de l’ouest et dont l’usage est dorénavant d’y abriter des étagères de livres (au-dessus desquelles il est mentionné qu’il est interdit de faire quelques chose… mais quoi?). Évidemment, je ne suis pas certain de vouloir tout saisir, et trouve la bizarrerie de l’endroit beaucoup plus intéressante, même si cela malmène ma curiosité. Le lieu, plutôt vaste, contient de nombreux jeux pour enfants, dont une gigantesque cage d’écureuil s’étalant sur une large surface, de vieux pneus peints il y bien longtemps, des animaux écaillés sur lesquels plus personne n’ose probablement s’asseoir ou encore un toboggan de béton autour duquel courent des gamins rieurs lorsque je quitte l’endroit rassuré de voir qu’il s’y passe encore quelque chose de joyeux, et pas uniquement les prises de vue d’un photographe cherchant l’inspiration.

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Dimanche 1er mars 2015

Alors, réalisant que je n’ai pas vérifié le contenu de la boîte aux lettres la veille voire l’avant-veille, je découvre, dans l’immuable enveloppe protectrice traversant les continents sans encombres, la couverture bleutée d’un livre qui ne pourra que me plaire (= La Recherche + Mathieu Riboulet) et l’écriture au stylo permettant le recto-verso que la plume (plus habituelle) interdit même quand le papier est épais (écrit-il).

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Le film du soir : Les 47 Ronins, Mizoguchi

Samedi 21 février 2015

Inventaire des panoramas de la banlieue nord-ouest, suite. Nous poursuivons notre découverte des alentours montagneux du Kinkakuji, avec leurs chemins escarpés, cette grand-mère ramassant des fougères, ces innombrables sanctuaires, ces immeubles caressant la forêt… et toujours ces distributeurs de boisson, où que l’on aille. Contrairement à ce qu’écrivait ce photographe à leur sujet, pour accompagner et justifier sa série d’images, ils ne sont pas pour moi le signe des lieux de tourisme et de consommation puisque on les retrouve là, pour ainsi dire n’importe où ; ils sont source d’étonnement, mais je ne sais pas précisément de quoi ils sont le signe, si ce n’est d’une société de consommation (de boissons et d’énergie).

Et puisque c’est soudain le printemps, voire l’été, c’est sur la terrasse que l’on déjeune, agréablement frappés par le soleil. On ose même, plus tard, imaginez-vous ?, une glace au hojicha. 

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Vendredi 20 février 2015

Inventaire des paysages de la banlieue nord-ouest, suite. C’est quelque chose de léger en apparence : les collines, les champs. Mais il y a cette architecture, cet urbanisme, ces bâtiments désaffectés, ces établissements scolaires non restaurés, cette femme qui pousse avec difficulté sa brouette au milieu d’une enfilade de maisons tristes, au balcons trop hauts, et dont les fenêtres en verre cathédrale ne laissent rien présager d’agréable pour nous qui vivons derrière de grandes baies qui laissent entrer la lumière et un paysage calme et serein, malgré cette cabane et son amas de détritus, devenus, au fil des mois, une amusante habitude visuelle.

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Mercredi 18 février 2015

Kobé. Située à seulement 1h de train de Kyoto, la ville dont le nom me fait immédiatement et tout le temps penser au tremblement de terre m’était inconnue. Osaka, plus proche et plus grande, suffisait pour voir des gratte-ciels. Kobé, pourtant, nous était vantée par Y pour son dynamisme, sa modernité…

La première image de Kobé (une fois passée celle de la gare et du bureau d’information municipal et après s’être retourné pour comprendre sa situation géographique, là, joliment logée contre les montagnes) fut une boutique au nom de Saturdays où l’on pouvait aussi bien y acheter des planches de surf qu’y boire un café assis sur un immense banc. Spacieuse, jolie, usant intelligemment de la chaleur du bois et de l’éclairage, on se dit tout de suite « ah ouais, ça c’est autre chose, c’est ça le Kobé dont on parle ! »…

Ensuite ? Son port et les silhouettes d’un certain bric-à-brac architectural, les traces du tremblement de terre, cette ridicule construction de Gehry et Ando, Chinatown qui n’est plus ou moins qu’un hymne à la bouffe, cet homme qui fait la manche – image, je crois, inédite au Japon – , ses quelques tours avec inimitable panorama sur les collines ou sur la baie, cette autoroute en pleine ville au bord de laquelle on rebrousse chemin, tant pis pour le musée préfectoral… et puis cette avenue interminable que tu compares à celles de Dallas.

Alors on sort de la ville, direction Arima onsen. Bêtement, sur le trajet qui grimpe là haut, on a les yeux rivés sur nos petits écrans pour travailler un peu le japonais, comme si finalement, déçus par la ville (et par notre visite trop improvisée), on n’avait plus rien à attendre, même pas du paysage.

L’idée, à présent, c’est donc, d’y revenir sous le soleil.

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Mardi 17 février 2015

Alors, tandis que je regarde cet étrange sécateur dont la mâchoire m’évoque celle d’un toucan, je m’étonne de cette minuscule boîte grise scotchée au dos. Pas le temps de la frôler plus d’une seconde qu’une alarme retentit, à peine plus forte que celle de ce réveil-matin emporté (à Poitiers ?) un jour de concours pour je ne sais quelle école (oui, à Poitiers) et qui, à cause de son ridicule et faiblard bilibilibili m’avait empêché de dormir par peur de ne pas me réveiller. Je n’avais pas obtenu l’école, mais c’était bel et bien à cause de mon niveau en maths et en physique et pas à cause du réveil. Quant à l’alarme au dos du sécateur, il ne serait pas impossible qu’elle sonnât encore…

+ Le temple du jour : ota jinja. Aller un peu à l’est de Kimogamo en espérant trouver un petit café désuet, et aller par là-bas. Monter par ce chemin dans la montagne, ne pas oser poursuivre. Au retour, regarder le plan. La prochaine fois, oser poursuivre, s’aventurer.

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Dimanche 15 février 2015

Chaque jour il notait ma tenue (ça n’allait jamais vraiment).

Nelly Kapriélan ; Le Manteau de Greta Garbo

La maison est désossée. Elle livre ses secrets de construction, elle dévoile cet équilibre entre la fragilité et la souplesse, elle montre les fantômes de pièces,  ajoutées dans les règles de l’art et de l’urbanisme japonais (c’est à dire n’importe comment), que K a voulu supprimer. Elle nous étonne et nous inquiète, et donc évidemment on pose des questions sur l’isolation.

Puis prendre un train, 240 yens, trois stations, au-delà des montagnes de l’est, là, près du lac. Nom de la station : Zeze. Patienter dans un de ces cafés à l’américaine parce qu’il est tard, que nous sommes très en avance, qu’il fait froid et nuit et que les pourtours de la gare ne donnent pas envie de faire quelque chose ressemblant de près ou de loin à du tourisme. Chez Komada’s coffee, les banquettes sont de velours rouge et le bois clair, le café coûte évidemment 400 yens, on nous le sert avec d’alléchantes petites cacahouètes et puisque il y a de la place pour 4 il y a de l’espace pour s’étaler un peu, gribouiller des maquettes de site web, lire peut-être. Dehors, sourire de rigueur, un jeune homme sous-payé brave le froid et ceux qui rêvent de décroissance pour attirer le chaland, lui faire tourner une boule et lui faire gagner je ne sais quoi voire l’estime de cette marque de téléphonie mobile qu’il représente, toujours souriant malgré le froid et les vaines courbettes. Bien sûr nous ne sommes pas là pour ça, mais pour une répétition de Dumb Type, que l’on atteint après un parcours dans des couloirs qui m’évoquent Playtime sans être vraiment sûr de proposer la comparaison adéquate. La répétition est un moment comme je les aime, sans ennui, avec la joliesse d’un bon spectacle et les fragilités d’une répétition.

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Samedi 14 février 2015

Cher F,

Sais-tu qu’ici aussi on fête la Saint-Valentin ? D’une manière précise (même si j’imagine que certains ne suivent pas la règle) voire un peu particulière, puisque les filles offrent du chocolat aux garçons. Mais pas seulement aux amoureux, non non, aux amis, aux collègues… Je me demande ce que les Japonais ne fêtent pas ! Aujourd’hui, nous sommes allés prendre un café dans ce petit endroit sur Kitayama tenu par une dame à l’âge incertain. Assis au comptoir, nous avons pu regarder ses gestes lents et oser quelques mots à propos de ce « neko-yanagi« , ces branches de saule en fleur (en chaton, précisément*) vendues chez tous les fleuristes et dont la variété posée sur ce comptoir était très originale – désolé, je n’ai pas de photo. Et alors, imagine qu’à la fin, elle nous a offert à chacun une plaquette de chocolat, emballée dans un papier cadeau hyper chamarré ! La cliente assise au comptoir nous a un peu parlé, mais nous n’avons presque rien compris (si ce n’est qu’elle disait, comme toujours ici, qu’on était doué en japonais).

A part ça, la lumière de ce matin était particulièrement forte ; le grand rideau qui nous sépare de la petite terrasse était beaucoup plus clair que les autres jours, frappé par le soleil reflétant dans ce tapis de neige qui, une fois de plus, nous accueillait au réveil – et qui disparaîtra en quelques heures à peine. Tu vois, on ne parle que de la météo ! (Alors que je ferais mieux de parler de ce spectacle de Monochrome Circus qu’on a vu ce soir…)

* Totalement PADC, n’est-ce-pas ?

Lundi 9 février 2015

Chère C,

Imagines-tu qu’aujourd’hui il a encore neigé ? On ne parle plus que de cela, de la météo, de la neige, du froid… Nous attendons le printemps, même si la neige donnait au Daitokuji des airs mystérieux lorsque je le traversai sous le ciel bas et gris ; surtout nous regardions tomber les flocons avec plaisir à travers la vitre du restaurant, lors du déjeuner avec Y. Elle vous embrasse !
Il s’agit encore et encore de découvrir jusqu’au moindre détail de la gastronomie japonaise. C’était le cas hier, lors du buffet chez notre ami D, avec ces kogomi – fougères d’hiver à ne pas confondre avec celles du printemps utilisées pour les warabi mochi – et ces haricots fermentés, spécialités de Daitokuji, dont le goût était presque épais, comme une réglisse amère. Et à nouveau, donc, aujourd’hui, avec ce restaurant vegan au beau milieu des temples ; une jolie succession de goûts (parfois discrets, tu imagines…) et de textures (parfois surprenantes, tu imagines…)… Connaissez-vous cet endroit ?

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Dimanche 8 février 2015

S’appliquer. A refaire un logo, à dessiner des lettres sur un gâteau, à prendre tout le monde en photo, à écrire des hiraganas et à conjuguer ces verbes, qu’ils soient réguliers ou irréguliers, avec le souvenir des anglais (awake, awoke, awoken) ou des espagnols (fui, fuiste, fue, fuimos, fuisteis, fueron).

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Samedi 7 février 2015

Antiquaire, marteau, vase, cadeau, six petits verres bleus pour 1000 yens, une caisse offerte, et toujours à l’esprit ce sketch des Nuls « Hassan Céhef, c’est possible« . Du tissu pour assombrir un peu les matinées de plus en plus matinales, toi qui grimpe (au rideau), B qui peint (le plafond), et toujours à l’esprit cette blague « Accroche-toi au pinceau, j’enlève l’échelle« . Un bain public et une  baignoire sur la jaquette du DVD de « Je vous salue Marie », et toujours à l’esprit le souvenir délicieux d’autres films (plus faciles / évidents / drôles / frappants) de Godard.

Vendredi 6 février 2015

Dans une formulation interro-négative, elle remarque avec étonnement que je n’ai pas mon appareil photo. Déjà passablement encombré (d’un pull, et plus tôt d’un verre et d’une assiette), je réponds que c’est trop lourd ; comment dit-on « encombrant » en japonais ? Nous quittons cette ambiance festive avec l’envie de revenir chez Kiln a un moment plus propice, nous deux, sans ressentir cette lassitude, cette difficulté pesante à aligner trois mots de japonais, diffculté qui met parfois en branle notre patience à maîtriser a minima cette langue, de longs mois après notre arrivée ici. Plus tôt, cet homme en costume qui m’avait pris pour quelqu’un d’autre et à qui j’avais dit rapidement que j’étais français, m’avait répondu avec une naïve assurance que « Allora parla italiano!« . Le hasard faisait que oui, mais au bout de quelques minutes, même cette langue amie, noyée toute la soirée dans un plus  habituel anglais et depuis une heure dans un brouhaha festif, même cette langue amie, donc, devenait une épreuve. Basta… Andiamo via…

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Mercredi 4 février 2015

C’est dans cette « banlieue » que je cherche. Les façades, les ruelles, le rien, le calme, les distributeurs de boisson destinés à l’on ne sait qui, les serres, les champs, les flancs de montagne, la rivière, l’usine là-bas… C’est là que je cherche ce qui pourrait générer quelque chose, parmi d’autres idées flottantes. Cet inventaire photographique non exhaustif des paysages de la banlieue nord-ouest de Kyoto est un lien inattendu avec l’exposition vue le soir-même, où, parmi les trois artistes, une photographe (et ancienne architecte) a déposé délicatement des petites tirages d’ici et d’ailleurs sous pochettes plastifiées. La simplicité de l’installation mais aussi l’idée que le spectateur puisse saisir les images et s’en saisir te touche et me redonne envie d’aller vers la simplicité du journal exposé il y a un an. A suivre…

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Mardi 3 février 2015

Quatre mois ! Quatre mois que je n’étais pas allé chez le coiffeur ! Exactement ! Mais bon, à la vitesse où poussent les cheveux, on n’est pas à 1 ou 2 jours près. Et le soir, c’est graillon pour chasser les démons…

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Lundi 2 février 2015

Rien de plus stupide, pour qui crut mourir, qu’une lente convalescence. après que l’aile de la mort a touché, ce qui paraissait important ne l’est plus; d’autres choses le sont, qui ne paraissaient pas importantes ou qu’on ne savait même pas exister. L’amas sur notre esprit de toutes connaissances acquises s’écaille comme un fard et , par places, laisse voir à nu la chair même, l’être authentique qui se cachait.

André Gide ; L’Immoraliste

Alors M nous montre ce qu’elle fait, toute en rondeur et en légèreté. La simplicité de fabrication – j’entends par là la facilité pour se procurer le matériel, pas forcément celle pour atteindre une telle perfection – me donne immédiatement envie de passer à ça, quelque chose de manuel, sans bug, sans crainte, sans contrainte. La nuit tombée, au bain public, la lumière artificielle et habituelle nous surprend moins que celle de samedi, puisque alors il faisait jour.

Dimanche 1er février 2015

La neige était tombée durant la nuit, il était une heure bien matinale, alors c’est le silence qui t’a réveillé. Joli tapis au petit matin, 6h40 y croyez-vous ?, nous voici dehors, éternels enfants.

La neige avait fondu, il était une heure avancée de l’après-midi après ce déjeuner avec D et K, alors on a traversé la ville, là-bas vers le sud, vers cet endroit où la curiosité et tes fonctions nous poussèrent malgré le froid pour une exposition de bijoux contemporains.

Le film du jour : Le rayon vert, Eric Rohmer.

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Samedi 31 janvier 2015

Mes chers amis, je vous savais fidèles. A mon appel vous êtes accourus, tout comme j’eusse fait au vôtre. Pourtant voici trois ans que vous ne m’aviez vu. Puisse votre amitié, qui résiste si bien à l’absence, résister aussi au récit que je veux vous faire.

André Gide ; L’Immoraliste.

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Jeudi 29 janvier 2015

Autour de la table basse, position accroupie, agenouillée, en tailleur, position typique d’ici ou rappelant les souvenirs étudiants dans un studio où l’on devait replier un canapé-lit aux motifs peut-être un peu regrettables, on en revient à ce pourquoi l’on se réunit toujours : le saké, la bouffe et l’envie d’être là, ensemble, pour se connaître mieux peut-être, mais ce n’est même pas sûr : montre-moi ce que tu bois et ce que tu manges – un gâteau vegan, par exemple – et je ne te dirai pas qui tu es. Mais avec un peu plus de saké, peut-être riras-je de ce que je dis.

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Mardi 27 janvier 2015

Il n’y a rien d’autre, sur la table, que la toile cirée, le dessous de plat et la cafetière.

Alain Robbe-Grillet ; Instantanés

Et il y a, sur la terrasse, la porte du cabinet de toilettes extérieur, arrachée par une bourrasque. Certains s’étonneront donc de la présence d’un cabinet de toilettes extérieur, ou y reverront leur souvenir d’enfance quand il fallait aller au fond du jardin.

Vendredi 23 janvier 2015

Dans l’espoir de trouver un vidéo-projecteur de moindre taille et à moindre prix afin de transformer nos séances de ciné-club en… heu… séances de ciné-club… nous voici de retour à Osaka, dans le quartier de l’électronique, à supposer que l’on puisse encore considérer qu’il y a un quartier de l’électronique, puisque, naïvement, nous pensions qu’un tel quartier, par définition, regorgerait de bricoles inédites en tout genre, et surtout d’innombrables versions miniaturisées de vidéo-projecteurs plus clignotant et clinquant les uns que les autres au milieu des écrans plats 3D du géant vert et des ziphounes six, mais non, que dalle en dehors de chez Bic Camera où nous n’étions pas entrés en arrivant dans la ville, snobant cette grande surface (« oh ben non quand même« ) pour aller dans ce quartier – et là je vais forcer le trait en évitant de parler des magasins de vidéos pornos – oui donc dans ce quartier aux rideaux baissés et aux vendeurs sachant principalement dire « je ne sais pas » et je ne vous parle pas du l’odeur de tabac froid dans ce bar triste à mourir malgré le programme télévisé au public rieur fin de la phrase retour à la maison.

Jeudi 22 janvier 2015

Je m’appelle Justin Marius Eugène PAUL, mon nom ne figure sur aucune des petites croix grises alignées dans un cimetière d’Argonne. Je suis pourtant porté disparu au combat le 17 mars 1915, « mort pour la France » pas très loin d’ici, à Beauséjour, dans la Marne, à la côte 196. J’ai disparu dans la boue. Comme mes camarades, moi qui ne connaissais par la campagne de Lincou, dans l’Aveyron, près de Réquista où je suis né le 30 janvier 1887. Jeune père d’un petit Justin, un autre Justin, je devenu argile, glaise hanneton ; je suis devenu bolet à pied violet, châtaignier, hêtre tortillard. Je ne connaissais pas le Nord, e n’ai pas de croix en ciment qui, même laide parmi les cailloux asséchés de soleil, éternellement à côté de soldats que je ne connais pas, sans le moindre arbuste, rappelle que je suis, moi aussi, venu mourir ici?

Colette Mazabrad ; Monologues de la boue

La pluie qui tombe ce jeudi vers 15h est la parfaite toile de fond de ma lecture à l’heure de la sieste, lecture dérangée par l’envie de retranscrire ici ces quelques lignes. De cette pluie de janvier on ne tirera que l’envie d’aller au bain et celle de regarder un autre Terayama dont les élucubrations, cette fois, nous assomment. Tu veux encore de la terrine ?

 

Mercredi 21 janvier 2015

J’ai vu le serpent le plus lent possible : il a mis un mois à traverser le jardin. La première fois que je l’ai vu, j’étais en train de couper de la lavande et j’ai vu quelque chose sous le buisson… Je suis tellement urbaine, j’ai cru que c’était un sac à main.

(= Le fou rire du mois)

Mardi 20 janvier 2015

Sur son sac est écrit « The world is full of fun« . Nous sommes à Osaka, allant ici ou là après la belle exposition Fiona Tan. Il vient de monter dans le métro, accompagné de deux collègues. Je le regarde sans trop insister, jette quelques coups d’œil, m’amuse de ses lunettes de soleil ; il travaille sur un chantier, le casque est dans son sac, ses chaussures et son pantalon sont maculés de blanc. Une cannette en saké le réchauffe, il grignote quelques chips dont l’odeur vient jusqu’à moi et il se marre avec son voisin de banquette dont l’absence d’un certain nombre de dents m’attristerait s’il n’avait pas l’air si joyeux, là, maintenant. Bientôt nous trouverons de quoi dîner, quelques nouilles dans un de ces bouibouis que la France n’ose pas.

Fallait-il dire à cette jeune femme qu’elle avait oublié l’étiquette ? Cela l’aurait sans doute fait rougir, elle qui, probablement, sortait heureuse de cette belle exposition de Fiona Tan.
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Lundi 19 janvier 2015

Je suis à peine plongé dans ce bain d’eau chaude qu’il s’approche un peu et me demande d’où je viens. Les questions qui suivent sont simples, mes réponses encore plus, le type d’à-côté me parle du Mont Saint-Michel, oui c’est au bord de la mer, et puis le premier reprend la parole, et en se désignant me dit en anglais « I am Christian« . J’hésite à lui dire que toi aussi tu t’appelles ainsi, mais flairant le truc bizarre – un Japonais qui s’appelle Christian ? – je ne prononce qu’un « ah ? « . Il répète alors ce que précédemment je n’avais pas compris et qui cette fois, mieux articulé, prend tout sons sens : Ji ho ba. Jéhovah ! Ben voyons, djobi djoba blablabla, et dans un sourire je lui fais comprendre que je vais dans le bain dehors et qu’il n’a pas besoin d’insister…

Il faudrait ensuite des pages et des pages pour raconter la fantaisie de ce trajet au milieu de rien (comprendre rien de joli ni d’intéressant dont on cherche la quintessence dans une supérette), la frustration de ne pas pouvoir (this is rare) profiter des bains de cet endroit à l’architecture extérieure tellement fascinante (et surtout tellement 1985), le raccourci dans les montagnes que, comme un David Vincent à deux roues, jamais on ne trouva, le resto Joyfull qui nous évita le MacDo, l’important étant que l’on puisse oublier les glaçons qui avaient remplacé nos orteils, et enfin le film de Resnais, « Mon oncle d’Amérique« , au fond d’un lit, loin des caprinés, des double-files et des témoins de je-ne-sais-quoi.

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Dimanche 18 janvier 2015

Nous partons alors à vélo, mais rapidement nous nous arrêtons pour ce bar, non pas parce que nous sommes déjà fatigués, mais parce qu’il a une bonne tête de l’extérieur. Installés, tu trouves que ce serait bien de venir y écrire – c’est à dire que je vienne y écrire, moi, parce que depuis cette table, dans l’espace fumeur malheureusement, là-bas, on y voit la rivière. Regarder l’horizon pour trouver l’inspiration au-delà ? Nous remontons ensuite à 3 ou 4 kilomètres au nord, là où la kamo s’amenuise et se dessine en torrents. Sur le trajet aller ou retour, cette usine, cette île, ce parc où rient quelques enfants, la musique des bee-gees provenant d’un minivan derrière le pare-brise duquel un pied bouge en rythme, cet étang au bord d’un cimetière que quitte un groupe de personnes vêtus de noir et venus en autobus ; ne serait-ce pas près d’ici, ce temple de mousses ? Parti sans appareil photo, je sais qu’il faudra revenir, il y a ici ou là de quoi compléter tel travail et entamer tel autre et je me demande pourquoi je n’étais jamais remonté jusque ici seul.

Plus tard, S (depuis quand ne s’était-on pas vus ?) puis K (… depuis trois semaines), et les Contes de la lune vague après la pluie.

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Samedi 17 janvier 2015

Parler des couleurs et des formes des radis ou des carottes, du bleuté de l’aubergine, de la neige que l’on cherche à distancer sur le chemin du retour mais qui nous rattrape, de ce premier dîner vegan semble-t-il réussi, puisque l’on a tu aux invités la préparation d’une terrine.

Vendredi 16 janvier 2015

Toi qui fus de ma chair la conscience sensible
Toi que j’aime à jamais toi qui m’as inventé
Tu ne supportais pas l’oppression ni l’injure
Tu chantais en rêvant le bonheur sur la terre
Tu rêvais d’être libre et je te continue.

Paul Eluard

Alors, à l’issue d’un incongru jambon-purée avalé devant le magnifique discours de Christiane Taubira, la gorge serrée, les yeux humides, voici que le réparateur de fuites qui n’a pour l’instant pas beaucoup fait ses preuves débarque avec son escabeau, son immuable veste aux teintes marronnasses, son air (…) et son pinceau, suivi par la gente féminine de l’agence toute en excuse et recherche d’explications. Ce virage d’émotion me semble exagérément mal venu, et je reste figé sans (bien sûr) comprendre ce qu’il dit, lui de marron vêtu, là, avec ses mouvements de bras qui laissent supposer que peut-être la pluie est plus maligne que lui, puisque qu’elle a trouvé le chemin et que lui, ben, il ne sait même pas si cette nouvelle tentative va être efficace. Et puis le soir, « Ash is falling » par Monochrome Circus, 5 corps glissant comme peut glisser la pluie, bougeant comme pourrait les faire bouger le vent, mouvements de bras qui laissent supposer que peut-être…

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Mercredi 14 janvier 2015

Oh bien sûr on pourrait parler des cannelés, c’est à chaque fois une valeur sûre, quand on a la chance de ne pas tomber sur ceux aux chocolats, qu’on ne peut guère distinguer avant d’y avoir croqué. Mais parlons plutôt du sens, ô surprise, que C met dans ses bijoux, comme autrefois on mettait une mèche dans un camée, comme on aime une boucle oxydée, puisque dans les petites boîtes de métal, dans les petits sacs étonnamment lourd pour un tel usage, dans les broches, il y a les souvenirs, le temps qui passe et s’écoule, le fil de la vie qui peut, à tout moment, se rompre. Dans le recoin exigu de l’atelier d’un joyeux chapelier, je la questionne sur les matières, leur noblesse ou leur aspect brut, et repart du rendez-vous rempli de poésie.

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Mardi 13 janvier 2015

Regarder « Labyrinth of grass » de Shuji Terayama dans un lit, alors que le sommeil gagne un peu, m’entraîne dans un état entre l’éveil et le rêve durant une quarantaine de minutes. Au réveil, le vrai, le lendemain, vers 8h du matin, on ne sait pas comment raconter le film, cette histoire de chanson, de mère, on ne sait pas pourquoi ce garçon se retrouve recouvert d’idéogrammes, mais je me rappelle vaguement qu’à La Poste il y avait The Look of Love de Dusty Springfield.

Lundi 12 janvier 2015

« Au soir des obsèques, le long du front de mer, je marche à travers les embruns, le fracas des vagues atomisées sur le béton dans le crépuscule, et je laisse mon regard errer à la surface des façades en lambeaux. Au milieu de ceux qu’il me faut désigner comme miens, dans une maison dont les recoins ternes et les odeurs de tiroirs ne m’évoquent plus rien, j’ai été saisi d’un malaise. Tout me parait hostile.

Jean-Baptiste Del Amo ; Pornographia

Le rideau n’est pas totalement baissé : par la porte on aperçoit des travaux. Aucun rapport avec un quelconque boulanger souffrant : nous sommes devant Muji, « notre » Muji de Senbon dori. Sur les affiches, une seule date, le 31 décembre, laissant supposer que le magasin est définitivement fermé, laissant grand ouvert notre désappointement. Poursuivant à vélo cette promenade de jour férié, nous voici dans une salle de sport pour envisager la reprise d’activités moins professionnelles / intellectuelles / culturelles / linguistiques… même si la confrontation avec le monde nippophone reste une activité linguistique intense. Sur le carnet je note une liste pense-bête pour mes vieux jours et ce journal. Parmi les mots : neige, vélo/VIVRE, pierre dans le jardin, photos voyage, Requiem Pierre Gilles (Jean ?), fin du film. Il manque le mot sapin, auquel j’aurais pu ajouter entre parenthèses « déshabillé ». A droite de la liste, entouré d’un trait maladroit, des notes pour ne pas oublier « ce que je sais » et qu’il faudra reporter sur ce document de déjà 13 pages, reporter et réécrire, prolonger, approfondir, imaginer.

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Dimanche 11 janvier 2015

Nous sommes une communauté de désirs, non d’action.

Cette phrase d’Annie Ernaux, bien que sortie du contexte du livre – les supermarchés – tombe assez bien en ce jour où l’on se retrouve, discute, écrit quelques mots sincères et maladroits sur un livre de condoléances. Ce regroupement n’est qu’une petite action par rapport à ce que nous aimerions tous, désirons tous, a minima l’application simple du « Tu ne tueras point » (et surtout pas pour ça). Derrière ce désir se glissent pourtant mille-et-uns désaccords, qu’on évoque à la fin du déjeuner, qu’on se renvoie debout dans cette salle de classe…

Au onsen, on cherche ensuite la quiétude, et dans ce bain extérieur qui me convient, je souris autant des paroles entre le petit garçon et l’adulte (« C’est un onsen ? – Oui… un onsen, c’est un super sento« ) que de la joie d’avoir compris ces deux phrases et demi (la troisième, qui commençait par l’idée que c’était près de sa maison, ayant été arrêtée dans sa compréhension par un flot soudain trop important de mots).

Et puis le film du soir : « Throw away your books« , de Shuji Terayama, folie babacoolo-punk de 1971 commençant par une scène magnifique. (→ Réfléchir plus tard à placer les mots désir et action)

 

Samedi 10 janvier 2015

En déposant mes articles sur le tapis, je pense avec un peu de malaise qu’elle va regarder ce que j’ai acheté. Chaque produit prend alors un sens très lourd, révèle mon mode de vie. Une bouteille de champagne, deux bouteilles de vin, du lait frais et de l’emmenthal bio, du pain de mie sans croûte, des yaourts Sveltesse, des croquettes pour chats stérilisés, de la confiture anglais au gingembre. A mon tour je suis observée, je suis objet.

Annie Ernaux ; Regarde les lumières mon amour

Devant le rideau baissé, des mots qu’on ne comprend pas ; un plan qu’éventuellement on cherche à déchiffrer ; la crainte que la fermeture soit définitive. dô iu imi desu ka ?, demandes-tu à un jeune homme passant par là… Oh, the baker is sick.

Le film du jour : L’épée Bijomaru.

Vendredi 9 janvier 2015

Place gratuite pour voir du nô parce que ça n’est pas complet = 20 minutes de musique (ok, très bien) + 20 minutes de questions-réponses (ok, j’exerce mon japonais mais comme d’hab je capte 3 mots, super) + 20 minutes de je-ne-sais-pas-trop-quoi (c’est à dire une dame qui nous fait une sorte de conférence sur la danse et vas-y, tout le monde doit gigoter en cadence, fou rire de votre serviteur resté sur sa chaise inclus) + 10 minutes d’entracte + 45 minutes de théâtre (avec heureusement fascination pour la partie jouée et chantée et pour ce gamin – de 12 ans à peine – faisant oublier la goutte au nez d’un des deux comédiens adultes dont je ne devrait pas totalement ma moquer car si je ne vais pas prochainement chez le coiffeur je vais finir par lui ressembler, sans la goutte au nez) + 5 minutes d’au revoir (oui oui sayônara).

Jeudi 8 janvier 2015

L’enfant rit en courant. Son père l’encourage, là-bas, mais le cerf-volant retombe. Sa jeunesse, j’espère, le protège encore des drames, et me fait oublier, un moment, les larmes, l’incroyable. Plus loin, d’autres voix joyeuses ; je cherche d’où elles viennent en quittant le sable humide du parc, et me retrouve sur un petit chemin de gravier, entre un cimetière et un stade de base-ball, tournant le dos à la mort et regardant la jeunesse courir encore.

Les souvenirs, comme parfois sur ces pages, reviennent. Cabu ou Wolinski, crayons de mon enfance ; Charlie, le journal lu pendant des années, dont les dessins agrémentaient encore chaque semaine mes courriels, Maurice et Patapon et leur idiotie nécessaire se frottant sur les réseaux sociaux… Bref. Ce regard personnel n’est rien à côté du drame et du symbole assassiné, et il n’est rien à côté des horreurs qui chaque jour, partout, depuis toujours et à jamais, noircissent les journaux ou étouffent sous le silence médiatique. Je suis Charlie et je suis tout le monde, ayant grandi avec un nom me rappelant chaque jour les fusillés et les dictatures, ayant grandi dans un environnement autant critique des religions et respectueux des croyants, et Kyoto, douce multitude de temples et de sanctuaires, est depuis 6 mois, je le reconnais, une terre de recueillement, loin du chaos du monde.

Loin du chaos, alors, faire connaissance avec J&A, dont les lumières de la « room #02 » éclairent depuis quelques soirs la vue vers l’est.

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Mercredi 7 janvier 2015

Je me disais, avant de partir prendre le bus, que je n’avais pas pris de photo pour illustrer ce journal du 7 janvier. Qu’importe. Il y faudrait des dessins, et encore des dessins, recouverts d’un voile noir.