La chambre donne sur un mur masqué par de lourds rideaux ; tu as l’air déçu face au crépis. J’ai demandé côté cour pour être au calme, j’ai demandé côté cour en imaginant ce que le mot cour laisse entendre, une respiration, un ciel, un arbre, peut-être un vis-à-vis indiscret. J’étais inquiet des travaux côté rue, qu’importe ce qu’on voit, je voulais nous réveiller sans heurts, marteaux-piqueurs, marteaux piquent heures. Je me disais que nous ne verrions pas que la nuit : je connais nos matins.
J’avais pris la chambre plutôt précipitamment, voulant te voir arriver débarrassé de tout ça, puisque l’homme au téléphone avait dit que non, plus rien, personne, le lieu était fermé, nous aurions dû être prévenus.
Dehors il fait nuit lorsque nous partons dîner, cherchant ce qui nous fera plaisir, cherchant ce qui ne semble pas déplaire à l’autre, sans chichi ni folie, avec peut-être juste ce qu’il faut de little something pour ne pas grimacer. Nous parlons de la couleur de la ville, tu lèves les yeux sur ce que tu ignores et sur ce que je ne connais pas beaucoup mieux, teinte légèrement ternie par le soir et la pluie. Alors place du Capitole nous dînons, sans folie mais avec, je crois, le plaisir pour moi d’être ici à regarder ce qui m’avait peut-être, il y a 27 ans, ébloui. Sans folie mais tu oses la saucisse locale.