Mardi 31 juillet
Tu m’appelles et me proposes autre chose plutôt que ce que l’on n’avait pas vraiment prévu,. Alors me voici chez S, pour voir enfin le livre, son livre, d’abord 150 pages vides et colorées, 150 couleurs pour un dégradé qui remet en cause la notion de page vide, c’est beau, et la suite l’est tout autant, dans ce lieu magique qu’est son atelier. « Attention derrière toi« , me dit-elle avec précaution et justesse, puisque mon oeil avait entr’aperçu et vite oublié la plaque qui se faisait discrète… Puis, tandis que l’on écoute les clapotis de voix, je cherche la jonction, le moment, l’endroit où cette même plaque se fond dans le mur par cet hypnotique jeu de similitude de couleurs, ces blancs qui n’en sont pas vraiment, surtout sur la photo. Les mots me viennent, un peu aidés par ce verre de vin peut-être, mais je ne note rien et puis j’oublie, la mémoire aussi se fond dans les murs blancs.
Lundi 30 juillet 2012
Reprise. Sur le sol du bureau la matière a changé, un faux parquet plutôt agréable a remplacé les vieux carrés de moquette qu’on essayait d’ignorer. La pièce vide résonne, sonorité étrange et oubliée des anciens déménagements. Une fois la dernière pile de dossiers multicolores posée sur ici ou là, ma voix rebondit encore sur le sol ; j’ouvre un peu la fenêtre, un peu de courant d’air en attendant la solution… De toute façon il fait un peu chaud, on parle de la météo, de celle que j’ai eu là-bas, de celle qu’il a fait ici, et comme je ne suis pas original, je rebondis sur le film du soir, Sans soleil, de Chris Marker, Chris Marker qui est mort alors évidemment tu me demandes, si j’ai vu le film, non, si je veux le voir, oui.
(Et j’en reste sans voix)
Dimanche 29 juillet 2012
Malgré tout on en a ri de toutes ces toiles d’araignées qui avaient envahi les bois et qui se collaient sur nos bras, nos cheveux, sur ces bâtons que l’on a fait mouliner pour combattre l’arachnide enjôleuse et insistante, nous pauvres Don Quichotte du dimanche matin partis faire un petit tour par là. Et puis je suis remonté, vers le nord les nuages devenaient plus présents, parfois menaçants, sombres, compacts. A très grande vitesse, lorsque l’on traversait ces étendues infinies qui nous font demander si la terre n’est pas plate, je les regardais, ces nuages, nombreux mais clairsemés, moutonneux, y cherchant une ressemblance avec un oiseau, un objet, un visage inconnu, mais nulle forme pour les rêveurs, sauf celle de quelques matelas accueillants. Dans le reflet de la vitre ce visage assez beau, que regardait en souriant cet autre garçon sur le quai de la gare de Poitiers et Morrissey qui chantait. Plus tard encore, chez Karen, chacun a évoqué les jolis moments qui ornent ses voyages, pourtant je n’ai pas parlé des nuages.
Samedi 28 juillet 2012
Les rayons un peu mieux rangés d’un autre bric-à-brac, puis l’abbaye de Fontdouce qu’on trouve malgré tout…
Et comme les jours se suivent et se ressemblent, c’est à nouveau sur quelques cartes postales que l’on s’arrête : un improbable couple années 70, ongles propres et transistor, ou quelques messages anti-Allemands d’il y a presque un siècle.
Vendredi 27 juillet 2012
Frpoussi arrive avec les nuages, et les espoirs de plage se transforment en errances dans les rayonnages et les rues, touristes parmi les touristes, avec, puisque tourisme, l’éclat de quelques cartes postales du meilleur goût.
Jeudi 26 juillet 2012
Sous l’ombre du grand chêne, là-bas, je profite du soleil qui perce à travers le feuillage. Il tourne et je tourne avec lui, lis et relis, écoute et réécoute la leçon numéro tant de ces cours de japonais, prends quelques photos de moi, vous savez ces autoportraits où je tombe, mais les vêtements sont ternes, le bermuda coupe trop la silhouette, et en maillot de bain non non on oublie tout de suite.
Pour les photos, alors, je cherche un peu plus loin, va chez la voisine, je crois qu’elle y est, car dans sa cuisine… non dans sa cuisine on ne bat rien du tout, la pauvre a le bras cassé.
Mercredi 25 juillet 2012
Il a l’insolence de sa carte 12-25, plus près du deuxième nombre que du premier. Dans la gare il arborait fièrement sa jeunesse et ce short rose bonbon qui frappait le regard dans ce hall triste. Baskets en toile blanche et tee-shirt blanc également parsemé de motifs pastels, le hasard l’assied à côté de moi, un siège et un couloir nous sépare. Autour de son cou un gros casque, il s’endort. Par la fenêtre, les paysages d’été, les champs moissonnés, les prés, la couleur de la paille et de l’herbe encore verte, je pense à une photographie à faire, frontale, le cercle d’une meule, l’arrière-plan coupé en deux, avec le bleu net sur la partie supérieure.
Du 10 au 24 :
Du 1er au 9 juillet
Oui… juillet ?
Les jours de juin s’accrochent. Ceux de juillet sont restés crayonnés dans un petit carnet. Dommage, ceux du premier étaient un peu tristes mais ensoleillés, sucrés comme un gâteau de chez Dalloyau et accompagnés de jolies images. Les autres ensuite je ne sais plus précisément, j’aurais parlé de Woody Allen, d’un film italien, de la pluie parce que je ne suis pas original, j’aurais mis une citation Premier Amour de Beckett en précisant que je n’avais jamais lu Beckett, j’aurais encore rêvé de voyage même si le prochain approche à grands pas et je sais maintenant que brosse à dents se dit haburashi.
Ce mardi 10 juillet nous partons à Kyôto pour deux semaines. Il y aura peut-être des images et des mots, des cartes postales virtuelles comme celle envoyées l’an dernier. Peut-être pas. Cela dépend du temps (celui qui se déroule et celui qui pleut)…
À suivre…