Jeudi 2 janvier 2014

C’est une impression de lumière rose. Car la lumière est forte et les couleurs sont vives sur les trois stands de forains qui, comme chaque année, illuminent la place. Ce soir il y a un adolescent en tee-shirt blanc malgré le froid. De sa carabine, il fait éclater les ballons qui voltigent ; au-dessus de lui une vache en peluche, au fond une vidéo de Céline Dion en concert, ça sent les gaufres. Comme chaque année je n’ose pas vraiment faire de photo, les deux vieilles dames de la pèche au canards me regardent. Comme chaque année je sais que de toute façon c’est impossible, il y a cet arrêt de bus dans le champ. Comme chaque année je regarde la simplicité de ces scènes de vie avec une certaine joie. Peut-être un peu de mélancolie tout de même, car à cette heure-ci il n’y a jamais grand monde et le bonheur des deux dames qui regardent tourner les canards dans l’eau froid doit être assez fragile.

Le film du soir c’est autre chose, pas de lumière rose mais le noir et blanc de Mouchette de Bresson. Il n’y a pas d’arrêt de bus dans le champ, il y a des vieilles dames, il y a des cadrages magnifiques, des mains surtout, des cadrages sur des mains qui donnent, qui touchent brièvement. Il y a surtout cette scène étonnante, marquante vers la fin de ce film magnifique, cette femme qui dit qu’il faut vénérer les morts, que ça devrait être ça la religion… qu’elle aime les morts.