Kyoto n’existe pas. On peut rapprocher cette capitale du néant par son climat. L’été est torride, interminable. L’hiver a des longueurs de banquise. Le printemps et l’automne passent en coup de vent : les arbres et les fleurs exhibent des couleurs boréales, puis enfilent des costumes de squelette.
Vincent Eggericx ; L’Art du contresens.
Les premières lignes du roman contredisent les semaines qui précèdent, où l’automne a pris son temps, offrant ce que les Kyotoïtes disent être « la meilleure saison », « le meilleur moment » : le ciel bleu n’en finit pas, les températures agréables non plus, à peine voit-on la pluie, à peine y croit-on, point commun avec la France. J’ai pioché ce livre sur l’étagère, tranche orange de chez Verdier ; on n’est jamais déçu avec Verdier (généralité un peu idiote donnant l’idée que – hélas ? – j’ai lu tous les livres et rappelant qu’on attend le prochain Mathieu Riboulet). J’ai pioché ce livre après que les quelques lignes d’un autre auteur, usant d’une terrifiante absence de style, m’avaient fait bien vite – quelques lignes, vous dis-je – reposé son ouvrage. Chez Eggericx, j’ai trouvé ce que j’aime lire (le glissé, la musicalité), et l’impression dès la première page que je complèterai ma connaissance de la ville par la vision d’un autre.
Bref, je pourrais également parler en souriant de ce cinquième étage d’ascenseur débouchant sur un placard, je pourrais parler de mes cartes de visite restées bêtement à la maison, je pourrais parler de céramique ou de photographie, oui, de Doisneau précisément, à l’affiche d’une petite exposition, Doisneau dont une image m’a étonnamment touché – parce que Doisneau, moi, vous savez, il m’a toujours ennuyé… Manque-t-il de glissé lui aussi ?