Mardi 11 avril 2017

Il me fallut alors affronter la pluie pour ce rendez-vous de 10h30 au consulat, affronter la pluie et les éclaboussures de sable ; étant un peu en retard, j’avais intérêt à longer les berges de la kamo. Frrrt frrrt frrrt faisait donc sur le chemin du retour le système mécanique du destrier Panasonic, dérangé par quelques grains intempestifs disparus un peu plus tard après un nettoyage en règle.
Mais c’est sur le chemin du retour que vous permettrez que je revienne et que je m’arrête un instant, ignorant comme souvent les usages réglementaires pour passer au présent de narration. Car voyez-vous, Kyoto est actuellement littéralement, totalement, improbablement, héberlument baignée de rose pâle sous l’effort printanier des variétés de cerisiers. Depuis plusieurs jours, j’ai beau n’aborder ce sujet que par touches discrètes, c’est une véritable effusion, irréelle, et le lecteur que vous êtes se trouve alors surpris : non, je n’ai jamais été à Kyoto en avril et je suis donc, là, pantois : la ville est rose (ô toulouuuuhouuuhouzeeeuuux).
Soudain, donc, chemin du retour, pluie légère qui s’intensifie, tu m’appelles, je m’arrête, je suis passé par le parc impérial où les gravillons détourne l’attention, je te dis qu’il pleut et je décide finalement d’aller plutôt par là-bas après avoir raccroché car le feu est vert — vert car tout n’est pas rose. C’est là que tout commence, parce que ces arbres transforme les rues, et que j’en emprunte une, inédite, bordée de mètres cubes de pétales, pour découvrir vingt mètres plus loin un temple inédit, et donc, sont-ce les fleurs ou l’état imbibé, mais quelle émotion, alors j’y reste, et même dans la salle de prière je prends mon temps, il faut dire que le plafond est splendide, que les couleurs sont fascinantes, qu’il y a une cloche que l’on peut faire sonner et que je ne suis pas très doué, et finalement après tout cela je poursuis ma route et le paragraphe et moi reprenons notre respiration. Autre rue, si souvent empruntée, le regard là encore attiré par les arbres aux couleurs inédites, un sanctuaire, une femme seule sous son parapluie et à l’esprit un sentiment étrange : cette ville que bientôt nous quitterons, cette ville est un mystère.

(Bon ensuite je pourrais vous parler du cardigan fichu à cause du blouson rouge qui a décoloré sous la pluie malgré le vêtement (pas vraiment) imperméable mais ça risque de casser l’ambiance.)