Nous voici enfin, l’un en face de l’autre, deux mois et douze jours plus tard. J’hésite à écrire “enfin”. Je sais pourquoi j’ai envie de l’écrire, pourquoi c’est exact de l’écrire, parce que cet adverbe a sa place, là, ce soir, deux mois et demi, tout de même !
Je vérifie la date. C’est bien cela. J’avais oublié que déjà j’avais parlé de toi. De ton regard. Ce n’est pas tout à fait le même ce soir, même si la tristesse l’a peut-être traversé quand tu l’as évoqué, lui, amer, déçu. Tu parles du temps qu’il faudra pour laisser un autre être auprès de toi, mais je crois que ce n’est pas ainsi que tu le dis ; j’ai oublié. Tu précises le temps que tu penses nécessaire ; je souris. Je souris peut-être parce que j’ai déjà un peu bu. Je souris sûrement parce que j’ai envie de dire quelque chose. Je souris bien sûr parce que j’entends ce que tu dis. Et nous buvons encore.