Je porte ce pantalon acheté l’état 2004 en Italie. Léger, ample mais bien coupé, d’un motif écossais aux belles teintes douces dont la dominante est un gris que je ne saurais exactement nommer. Je l’ai tant aimé qu’il est encore là. Il porte les stigmates de toutes ces années d’usage : le bas déchiqueté que je n’ai jamais fait recoudre, et une légère décoloration sur les cuisses. Je l’enfile ce matin, après un rapide coup de fer à repasser, pour aller au cabinet médical ; il me semble adapté aux températures extérieures et pourtant j’hésite. Je sens que cela ne va pas : il est le passé. Pourtant je n’ai pas cette sensation avec d’autres vêtements qui ont résisté au temps et que je porte encore, telles ces bottines – achetées elles aussi à Lecce, l’été 2005 – qui ont pourtant souffert et dont le cuir a craquelé d’être abandonné quelque temps, tels ces débardeurs ou ce tee-shirt noir qui appartenaient à F. Je ne sais pas exactement ce que cela signifie, j’essaye de comprendre. Ce pantalon est peut-être le signe d’un temps définitivement révolu, celui d’une certaine audace due à l’âge, là où ce tee-shirt uni n’a rien d’audacieux, si ce n’est sa coupe et sa taille. Alors, au retour, après que j’aurai fait rire l’infirmière, pour éliminer cet étrange malaise que j’ai à le porter, je le remise, choisis ce bermuda bleu foncé qui se retrouvera poussiéreux au retour de l’après-midi, et glisse deux maillots dans mon sac : la piscine d’A m’attend.