Peut-être qu’alors la couleur de ta peau aurait quelque chose de presque irréel, magnifique, sublimant ce qui déjà était indépassable dans la beauté que tu trimballes. Je te demande si as bronzé, tu me dis que oui, peut-être, tu as beaucoup été dehors durant ton séjour. Et puis nous parlons des autres, de l’idée d’aller ensemble à un concert mais c’est beaucoup trop cher, et je ne crois pas que j’évoque ce que je vais faire ce soir. On parle aussi des corps, et le tien, ou plus précisément ton ventre, intervient, c’est-à-dire que tu le montres, dans l’escalier, tandis que nous partons. Je te dis ce que j’en pense, mais nous n’avons pas le même avis ; tu voudrais qu’il fût musclé.
Le soir, il y a Volodine, il fait partie de ces auteurs dont on peut négliger le prénom. Volodine, c’est un de ces nombreux visages – mais le sien n’est nullement hâlé -, que j’ai rencontré à la villa K. La rencontre dans la librairie, entre lui et la vingtaine de spectateurs que j’ai rejoints, est légère. Elle me donne envie de lire son dernier roman, celui qui est là, posé sur la table, et que ce type de moment pourrait gâcher de trop en dire. J’avais, au Japon je crois, tenté la lecture de Le post-exotisme en dix leçons, leçon onze ; je m’y étais heurté. Après la rencontre, je m’approche, je lui demande s’il se souvient de moi en baissant mon masque, oui bien sûr. Je ne sais pas exactement le souvenir que j’ai laissé à tous ces artistes qui venaient à la maison pour dîner, ou le dimanche pour des poulets rôtis ; Volodine est, je crois, sur la photo de groupe que nous avions faite pour célébrer notre départ. Je ne sais pas où est cette photographie, je n’ai jamais trop su comment la regarder : sous une apparence joyeuse elle est encore pour moi tout un ensemble de sentiments loin de la joie.
Et puis je laisse la place, je m’approche de la caisse, achète le roman, reviens, dis que “Finalement c’était bête de ne pas l’acheter.” Je dois être un peu ridicule, ou un peu faux-cul. Il y laisse un mot. Oui, je saluerai Ch de sa part.
Enfin S et moi allons dîné. Je ne lui parle pas de ton ventre. Tu interviens pourtant, brièvement ; je crois qu’on parlait d’aimer.