Ainsi tout commence avec le plaisir de voir le lever de soleil depuis une autre fenêtre que la mienne, puisque depuis ma fenêtre je ne vois qu’un mur et le ciel au-dessus, puisque je donne vers l’ouest. Nous petit-déjeunons debout, tu es gêné, je te rassure, c’est ainsi que je fais, chez moi, seul, mais tu ne le sais pas : lorsque tu es là, nous nous asseyons, nous prenons un peu de temps, je sors les confitures et toujours il reste un peu de café et toujours je nous ressers un peu.
Et puis la journée se déroule, tout va vite, trop vite, moi-même je vais trop vite, je ne réfléchis pas ou pas assez et puis le soir arrive, enfin je suis chez moi, il est vingt heures trente passées, le four chauffe pour avaler cette incontournable pizza au pesto à moins de trois euros prise au rayon surgelé de la supérette qui a changé ses horaires et qui me permet donc de partir tard du travail sans craindre de n’avoir rien d’alléchant dans le frigo. Dans les e-mails, il y a ce courriel de l’école des Beaux-Arts de Bordeaux puisque je serai élève du cours public “Rendez-vous photo” à partir du 9 octobre : on y précise le lieu des cours, les dates pour le 1er trimestre, le fait qu’il faut fournir une photo pour le trombinoscope et qu’on aura accès à la bibliothèque et j’y puise une joie immense. Dans les e-mails, il y a l’urssaf qui me dit d’aller voir ailleurs, que ce n’est pas chez elle que cela se passe, et je souris, quand bien même tout cela me semble bien compliqué : j’y vois le début, bien amorcé, d’un virage.
Et puis j’ouvre le carnet noir acheté la veille. Je note la date. Et j’écris deux pages. Je suis l’un des nombreux participants du projet de “Journal intime collectif” de Mathieu Simonet. Je suis enthousiaste et pourtant je sais que ça ne va pas être très bon, ce que j’écris là, pas tout de suite. Je tente mon expérience au creux de la sienne.