Dimanche 14 janvier 2018

Vous me demandez : Regarder quoi ?
Je dis, eh bien, je dis la mer, oui ce mot, devant vous, ces murs devant la mer, ces disparitions successives, ce chien, ce littoral, cet oiseau sous le vent atlantique.

Marguerite Duras ; L’homme atlantique

Je m’assieds devant l’écran et je note brièvement ce que je n’ai pas noté hier en me réécoutant, ce que je n’ai pas noté et qui me revient là, c’est-à-dire ce complément sur la peur et les idées qui me viennent, à peine rentré à l’appartement donc, comme une fulgurance. Le brouillon précise dorénavant l’heure : 15h59.
À peine rentré, oui. J’étais passé devant le centre Pompidou, il n’y avait pas la queue, j’étais entré. J’avais dit Ah tiens oui c’est bien et j’avais demandé un tarif demandeur d’emploi. Alors gratuitement j’avais vu César et Derain, les matières et les couleurs. J’étais heureux devant l’hommage à Nicolas de Staël, de César, et puis cet homme de Saint-Denis, c’était beau. J’étais surtout heureux devant les couleurs de Derain, cet orange Collioure, ces bleus venant d’ailleurs, de chez Matisse peut-être, ces ocres là, de chez Cézanne sûrement, ah ! Ah, même si la plus belle c’était peut-être — permettez-moi une petit mièvrerie — celle du ciel, les yeux encore un peu endormis à midi, j’étais en terrasse, j’avais commandé un double expresso, il faisait frais, j’aimais ça, je ne savais pas encore pour le musée, les matières, les couleurs, tout ça, je n’imaginais même pas la jovialité des enfants qui découvraient César et encore moins la mienne en les écoutant.