Il fait nuit. Je rentre. Nous avons bu un verre, avec E et L. L n’a pas beaucoup parlé, mais je crois que je l’ai amusé : je l’ai vu esquisser quelques rires. Nous ne sommes que rarement rencontrés, trois fois je crois. La première fois, c’était chez moi, j’avais cuisiné un curry ; il ne mange pas de champignons. Avait-il beaucoup parlé ? En face de moi, ce soir, il y avait un couple, une homme et une femme, un peu plus de trente ans peut-être. E et L leur tournaient le dos. Ils étaient beaux, vraiment, l’un comme l’autre. Elle portait un pull-over plutôt d’un jaune un peu acide, ample, dans un tricot aéré et lui quelque chose de plus neutre, une veste noire par-dessus une chemise claire. Il portait une barbe noire, il avait un visage qui donnait envie de l’aimer, elle semblait avoir de la chance, leur conversation était calme, ils buvaient du vin blanc, parfois leur présence m’éloignait de ce qu’E disait, puisque L ne disait rien.
Je rentre et au milieu des sujets de conversations rebondissant, j’ai évoqué la beauté du passage du film d’hier. Plus tard, j’enverrai l’extrait à E. Il me dira que cela lui donne envie de voir ses films ; je crois qu’il a déjà écrit cette phrase, l’autre jour.
Je rentre et sur le trajet je lis le dernier texte d’Antonin Crenn. C’est beau. J’aurais aimé écrire la même chose, pour les mêmes raisons, avec la même histoire et la même temporalité.