Être là, tous les deux. Dehors il pleut, ce n’est pas grave, je m’en fiche. Non je ne m’ennuie pas : je suis là. Je lis, un peu, à peine. Je laisse le temps avancer, dans cette maison, près de la fenêtre, devant la cheminée, où j’aime être, pour regarder les mots et voir dehors, rien, du coin de l’œil, la glycine et la pluie qui tombe. Il y a parfois la télé en bruit de fond, parfois elle m’attrape vraiment, elle m’emmène vers d’autres continents, par exemple les fins fonds de la Papouasie, d’autres habitudes que les miennes, j’aime ça, je suis là pour autre chose, pour ne pas être dans mon unique silence. Pour être avec maman. Être là, tous les deux, ensemble, côte à côte, parfois je dis peu, trop peu sûrement, coincé dans ce que je suis, un peu comme pouvait l’être mon père. Mais je n’ai pas vraiment peur de parler de toi. Parfois nous rions.
Je crois que c’est la première fois qu’il y a un jour chez elle/chez eux sans image. L’automne, c’est-à-dire la pluie derrière la fenêtre, a eu le dernier mot. Ou peut-être que ça vient de moi, de ce qui se déplace. Les images vont ailleurs. Elles se raréfient en même temps qu’elles intensifient, du moins je le crois – du moins je l’espère. Elles ne sont plus que rarement la part manquante qu’avait si bien exprimée Christian. Elles sont ailleurs. Et toi non plus tu n’es pas là.